Les trois Grâces Rubens

Qu’est-ce qui pousse les personnes à s’astreindre à des régimes alimentaires draconiens ? Plus qu’une bonne santé, c’est l’image qu’elles renvoient. Lèvres pulpeuses, absence de membres potelés, poitrines agressives, ventre plat, cuisses galbées mais fines, fesses rebondies, etc. sont les critères incontournables pour répondre aux canons de beauté de notre époque. Le temps passe, les modes changent. Se faire une idée de l’évolution de ces modes est aisé si on se penche sur les tableaux anciens des grands maîtres de la peinture. Par leurs rondeurs, bien des modèles de Fragonard, Boucher, Botticelli ou encore Rubens n’auraient pas aujourd’hui l’honneur d’occuper leurs toiles.

Se consacrer à l’esthétique de son corps est dans l’air du temps, aussi le paraître accapare les volontés.

Modeler son corps à sa guise est signe d’une grande liberté mais une liberté qui se paie de plusieurs façons (chirurgie esthétique, régimes alimentaires stricts, privations, etc.) sans compter les impondérables (anorexie, opérations ratées). Cet ensemble se justifie par le seul fait d’avoir un corps approchant au plus près les corps « parfaits » défini par un marketing dont les visées réelles sont les retombées financières.

Mais en fin de compte, qu’est-ce qui est beau ? Y a-t-il une définition de la beauté ? Comme évoqué précédemment, la beauté varie selon les époques, les cultures, les modes, chacune définissant des « canons » auxquels femmes et hommes sont, plus qu’invités, tenus de se conformer.

Bien que les publicitaires harcelés par les mouvements féministes, essaient de composer avec les rondeurs, être belle c’est avant tout être fine voire maigre ! le corps doit être mince, musclé, lisse, hâlé et désormais chirurgicalement modifié. Cette transformation des corps s’accompagne d’une très florissante industrie : les cosmétiques bien sûr, c’est-à-dire des produits dits « de beauté », tout comme, (n’ayons pas peur des mots) de l’industrie de la chirurgie esthétique.

Dans notre vie, la mode occupe une place centrale, celle célébrant le triomphe de l’apparence.

La science ne cesse de s’intéresser au corps et intervient non seulement pour le soigner, mais aussi et de plus en plus pour le modifier, le modeler afin de lui donner cette apparence conforme à l’idéal du moment.

On doit se plaire, on doit s’aimer pour cela on doit se juger. Rien de tel que le smartphone, cet appareil miraculeux qui fixe le temps. Lamartine serait aujourd’hui aux anges ;

« Ô temps, suspends ton vol ! et vous, heures propices, suspendez votre cours ! » Lamartine.

Oui, l’image photographique saisit l’instant, arrête l’écoulement du temps, suspendu pendant la prise de vue qui vole au temps une fraction de seconde.

L’appareil nous renvoie notre image, notre apparence superficielle celle qu’on s’est construite et qui nous apporte le soulagement de répondre aux critères du moment. Et puis si tel n’est pas tout à fait le cas il y a toujours moyen de dire ;

« Non pas cette photo, je suis moche, reprend moi plutôt comme ci ou comme ça…. »

Dans notre société, la reproduction photographique est devenue incontournable et l’acte de photographier, et de se photographier, est en soi un geste esthétique.

Décidément ‘’l’esthétique’’ du corps nous tourne les têtes.

DS

Odalisque brune Boucher