Dans les années 50, la Cerdagne française, petit nid d’altitude, coincée entre l’Espagne, l’Andorre et l’Ariège est une espèce de réceptacle, de creuset où viennent encore se réfugier des républicains espagnols ou italiens traqués par la police de Franco, mais c’est aussi un lieu privilégié pour beaucoup de personnes affectées par des maladies pulmonaires. Les grandes privations qui ont sévi pendant la guerre 39-40 ont eu entre autres conséquences un fléau qu’on dit aujourd’hui éradiqué ; ‘’la tuberculose’’, maladie à l’époque incurable. Dès leur arrivée sur le plateau cerdan et grâce à ce climat privilégié qui le caractérise, ces grands malades connaissaient comme par miracle une rémission, aussi leur séjour était de longue durée et pour répondre à une forte demande, de nombreux sanatoriums s’y étaient implantés pour les accueillir.

La Cerdagne était un ‘’melting pot’’ de nationalités. Ch’tis (nord), Bretons, Espagnols, Catalans, Italiens, Portugais se côtoyaient quotidiennement. Chacun avait besoin d’une respiration nouvelle, besoin de liberté, de gaité, de paix, de fêtes, de partage et de tolérance. Vivre, voilà ce qui primait, mais vivre en harmonie avec les autres comme on le fait naturellement après les grandes catastrophes. La Cerdagne, territoire alors souvent oublié voire inconnu par une France en pleine reconstruction, devait se suffire à elle-même d’où cette vie riche de liens étroits entre ses habitants.

Dans des souvenirs égrenés sous forme de nouvelles, un jeune homme raconte toute une époque qui traduit l’amitié, la tolérance et le partage. Il parle de relations qu’il oppose à l’Europe d’aujourd’hui, qu’il voit comme un vieux rafiot à la dérive manquant de chavirer chaque fois que quelques exilés viennent s’accrocher à son bastingage. C’est dans ce livre, de toute une époque disparue, qu’il relate.

La Cerdagne

Pour aimer la Cerdagne, il est impératif d’être amoureux des couleurs, pas de ces couleurs qui ont fait le succès d’une Renaissance peinte par des génies comme Leonard de Vinci, Michel-Ange et tant d’autres dont s’est fleuri le XVIe siècle. Non, il faut aimer les couleurs capables d’écrire ‘’Guernica’’ ou encore ‘’La Bataille de Tétouan’’ que seuls Picasso et Dali pouvaient raconter. Nos couleurs sont vives comme le sang du drapeau catalan, jamais lavées par les brumes du cœur.

Pour aimer la Cerdagne il faut aussi savoir résister aux sons nasillards et criards des fifres, clarinettes et aubois qu’atténuent un peu des tambourins venus imposer leur rythme lancinant à trois temps. La sardane joue avec nos nerfs, elle est comme ce vin âpre que seul le viticulteur qui l’a fait en perçoit toutes les rondeurs. Ces sons sont les nôtres et on se complait volontiers dans l’atmosphère qu’ils remplissent.

Pour aimer la Cerdagne…..